Le Panaris

Publié le 27 Janvier 2015

Le Panaris

J'allais me lancer dans une analyse du modèle d'intégration néo-zélandais ces derniers jours, d'où mon absence somme toute relative, mais je me suis vite aperçu que cela serait un peu long et lourd. La tache s'avérait d'autant plus compliqué que je devais expliquer de nombreux éléments et que je pense ne pas en savoir assez. Mes rencontres avec des kiwis restent encore marginales. Mais le hasard est venu poser sur son chemin un petit rebondissement dans ma vie de tous les jours par l'intermédiaire d'un panaris, ce qui m'a permis de découvrir le système hospitalier.

Depuis quelques jours, je souffrais du doigt. J'avais déjà eu quelques panaris mais toujours bénins et j'avais reconnu la douleur lancinante dans mon pouce gauche. J'espérais que cela passerait, mais le mal ne me quittant pas, je consultais des sites internet médicaux pour savoir quoi faire en cas de de complication. Je savais que mon père et un ami, François, avaient eu à se faire opérer pour ce genre de blessure qui avait mal tournée. J'apprenais que si le doigt commençait à trop gonfler, que du pus apparaissait et que la douleur se faisait plus grande la nuit, il fallait consulter un médecin. N'étant pas à ce stade d'évolution, je me couchais donc hier soir, comme à mon habitude, si ce n'est un gros sac laissé à portée de mon lit par un des autres occupants qui m'en rendait l'accès difficile.

Dans la nuit, vers cinq heures du matin, j'étais toutefois réveillé par l'inflammation de mon doigt, et l'arrivée d'une petite tâche jaunâtre tout près de l'ongle. Je me décidais donc à agir, ne parvenant pas à dormir. Je trouvais un numéro de téléphone gratuit donnant accès à des conseils qui permettaient de savoir si l'on devait se rendre aux urgences. J'appelais très tôt dans la matinée et une infirmière me demandait plus de détails après à peine une minute d'attente. Elle résidait à Auckland, mais me dirigeait vers un centre sur Wellington, proche de mon lieu de domiciliation, me précisant qu'il me serait plus utile si j'avais besoin de médicaments de me rendre dans une grande surface par la suite. J'avais effectivement remarqué que la plupart d'entre eux en vendaient lorsqu'une ordonnance n'était pas nécessaire et que des pharmacies y permettaient d'en obtenir pour des prix avantageux. L'infirmière au bout du fil me souhaitant bon courage me réconfortant et m'appelant par mon prénom comme il est d'usage d'ici. Une heure plus tard, un autre résidant de l'auberge entrait dans la cuisine et engageait la conversation. Pakistanais d'origine, il avait passé trente-trois ans à Auckland mais vivait à présent avec sa famille qui l'accompagnait, en Australie. Il confortait mon choix de m'être rendu en Nouvelle-Zélande et me suggérait de prendre un thé, ce qui était chose faite. Je reconnaissait là un trait de caractère que j'appréciais dans la culture du thé rédempteur.

Cherchant à parer a d'éventuelles dépenses, je profitais du temps qui me restait avant l'ouverture de l'établissement que m'avait indiqué l'infirmière pour effectuer un virement de compte à compte. Je m'apercevais alors que cela n'était pas possible, mon compte principal étant à découvert de près de deux-cents euros ce qui entraînait un blocage complet de toute opération. Il me semblait pourtant avoir relevé mon plafond, mais depuis mon départ, je ne suis plus une surprise près venant de ma banque. J'échangeais donc des messages avec mon père et il me suggérait d'utiliser ses détails bancaires pour les frais qui seraient occasionnés.

Sur les coups de huit heures, je me rendais dans le petit établissement de jour, spécialement adapté à l'accueil des visiteurs étrangers de passages. Peu de monde patientait et l'accueil y était chaleureux, la secrétaire présente faisant son possible pour faciliter mon paiement via le compte de mon père. Je m'asseyais et à peine cinq minutes après étais appelé par une infirmière et une stagiaire me prenant mon pouls, ma température, et me demandant quelques informations supplémentaires sur mon état de santé pour être au mieux traité après cette phase de triage. Je retournais m'assoir et n'avais pas longtemps à patienter encore avant qu'un médecin ne me fasse entrer dans son cabinet. Il comprenait rapidement de quoi il s'agissait puisque j'avais cherché la traduction des termes médicaux adéquates avant de venir. Il m'accompagnait dans une pièce où de petites salles de soins étaient séparées par des murs amovibles et échappaient aux yeux du publics par la voie de rideaux verts-bouteilles. Engageant le traitement de ma plaie, il m'expliquait en détail chacun de ses gestes, allant jusqu'à me faire regarder ce qu'il faisait avec mon doigt pour drainer le pus qu'il contenait. Par chance, il semble que j'étais arrivé assez tôt pour éviter une opération, et il me conseillait de revenir deux jours plus tard si la blessure n'indiquait pas d'amélioration. Il me laissait ensuite entre les mains d'une infirmière pour un pansements qui, comme à l'habitude des kiwis, prenait son temps pour effectuer le bandage, mais y mettais toutes les précautions du monde. Je n'avais pas, durant le temps de ma présence sur place, le sentiment d'être chez un médecin, mais plutôt chez mon coiffeur lorsque je suis à Paris, dont j'ai toujours apprécié la minutie et le goût du travail proprement terminé. J'étais également surpris par le fait que pas un instant je n'avais pas été mis au courant de ce qui était pratiqué sur mon doigt, pour dédramatiser la situation, ce qui réussit.

Après cette étape, je me rendais dans une pharmacie dans un supermarché proche. La douleur avait déjà diminué, mais en raison de l'inflammation des tissus, je devais être mis sous antibiotiques. Devant le guichet, une femme courbée devant les étalages me semblait patienter aussi, puis elle se relevait se tournant vers moi. J'étais surpris par son visage inexpressif en raison vraisemblablement d'une chirurgie esthétique récente et d'un rouge à lèvre peu adéquate, associé au fait que je découvrais qu'elle travaillait dans cet endroit. Un autre pharmacien prenait sa suite et m'indiquait que le prix du précieux élixir serait de quinze dollars, ce que je trouvais très raisonnable alors même que je ne suis pas résidant ici. Je rentrais chez moi et finissais la nuit que j'avais terminé bien trop tôt à mon goût. Une conversation avec mon père et ma sœur me laissait penser que les problèmes avec mon compte seraient rapidement réglés, tout du moins l'esperé-je.

Rédigé par Pausanias

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